Alessandro Zinna et Jacques Fontanille ➤ Fiche de présentation : Umberto Eco sémiologue / Jean-Marie Klinkenberg ➤ Umberto Eco savant, humaniste, homme / Valentina Pisanty ➤ Umberto Eco professore / EmMa et Mariela Crivat-Ionesco ➤ Dessin d’Umberto Eco / SeS de Puebla ➤ Eco a México a inicios de los 80’s / François Jost ➤ Du sémiologue au romancier : le gai savoir d’Umberto Eco / Denis Bertrand ➤ Umberto Eco ou la traversée des savoirs suivi par L’homme livre / Tarcisio Lancioni ➤ Per Umberto / Gianfranco Marrone ➤ Due forme di stupidità /
Autres hommages à Eco sur la revue ➤ Ocula
Umberto Eco sémiologue
(Alessandria 1932-Milan 2016)
Né à Alessandria le 5 janvier 1932 et formé à l’école de l’esthéticien et herméneute Luigi Pareyson, Umberto Eco est décédé le 19 février 2016.
Il débute avec une thèse sur saint Thomas d’Aquin (Il problema estetico in Tommaso 1954). Dans un premier temps, il s’intéresse à la scolastique médiévale (Sviluppo dell’estetica medievale, 1959), pour se tourner peu après vers l’art d’avant-garde (L’œuvre ouverte, 1962). Ce livre – l’un des plus marquants de ses exordes – est révélateur des problématiques sémiotiques à venir. Eco tire toutes les conséquences de la multiplicité des interprétations qui sont demandées par la production des œuvres contemporaines, tout en les attribuant à leur organisation interne. Ainsi, bien que le mot « structure » n’apparaisse pas dans ce texte, la collaboration au numéro monographique de la revue Communication – consacré à L’analyse structurale du récit (1966) – consolide chez Eco l’écoute de la naissante sémiotique française. Une attention particulière est portée aux écrits de Roland Barthes, dont Les Mythologies lui inspireront toute une série d’articles brefs recueillis dans le Diario minimo (1964), et plus tard une étude de la culture et des communications de masse (Apocalittici e integrati, 1964).
Sa découverte de la sémiologie associe les acquis de la vague structuraliste à une prise de distance, sinon une véritable polémique, à l’égard de la notion de « structure » et d’un certain « structuralisme ». Cette position transparaît par exemple dans le titre de La struttura assente, (1968). Sa recherche sémiotique se tourne alors vers le concept de signe, suivant les précurseurs américains, dont Peirce et Morris (Il segno, 1971). Cette petite introduction contient déjà un dépassement de la théorie de Jakobson proposant une typologie des intentions de l’émetteur et du récepteur. La systématisation des acquis de cette première période est publiée quelques années plus tard dans Trattato di semiotica generale (1975). Sans renier pourtant les positions de Saussure et de Hjelmslev, sous les influences du philosophe Ch.-S. Peirce, ce livre propose une définition de la sémiotique comme « théorie des signes » et se fonde sur un partage entre une théorie des codes et une théorie des modes de productions des signes : les uns considérés comme fixes et statiques, les autres différenciés selon la dynamique de leur production. Vraisemblablement, ce partage lui est suggéré par l’expérience de l’innovation esthétique, qui a comme finalité celle de dépasser constamment les règles de composition. Eco reviendra encore sur le signe, mais cette fois pour en reconstruire l’archéologie. En dépassant l’histoire la plus récente de ce concept, il se tourne vers Platon, Aristote et les stoïciens pour montrer que, même d’un point du vue historique, la relation entre l’Expression et le Contenu est une relation d’inférence plutôt que d’équivalence. Eco essaye ainsi d’étendre le concept de « signe » à l’ensemble du « texte » sans pourtant revenir sur la définition de la sémiotique. Ces positions sont résumées et publiées dans l’entrée « Segno » de l’Enciclopedia Einaudi, (1981, et ensuite dans Semiotica e filosofia del linguaggio, 1984).
Suite à l’affirmation des théories narratives et textuelles, développées au cours des années 1970 – en particulier par la découverte des formalistes, de Propp et celle de la narratologie de G. Genette et, surtout, de la sémiotique de Greimas et de son École –, vers la fin des années 1970, Eco conçoit une théorie de la réception du texte qui vise à reconstruire le rôle de l’interprète comme « lecteur modèle ». Tout en posant au centre le lecteur implicite, Eco souligne l’importance de la coopération interprétative. Le texte est comparé alors à une machine paresseuse qui, pour être mise en marche, nécessite l’intervention active de son récepteur, ce dernier étant chargé d’en remplir les espaces vides (Lector in fabula, 1979 ; voir plus tard, les Notes sur la sémiotique de la réception, de 1987 et, dans cette même direction, les conférences américaines éditées dans Six Walks in the Fictional Woods, 1994). Au début des années 1990, cette réflexion autour de la réception et de l’interprétation constituera le sujet d’une recherche qui se poursuivra par I limiti dell’interpretazione, (1990), et plus tard dans Interpretation and overinterpretation (1992). L’année suivante Eco publiera La Ricerca della lingua perfetta (1993), ouvrage qui s’efforce de rendre compte de cette aspiration de l’homme à construire, tout au long des siècles, une langue qui serait à la fois idéale, artificielle et à vocation universelle.
La problématique philosophique, toujours présente chez Eco qui, à plusieurs reprises, a défini la sémiotique générale comme une philosophie du langage, revient plus clairement dans Kant e l’ornitorinco (1997). La question de l’Être – abordée dans I limiti dell’interpretazione comme résistance du texte à se laisser interpréter en totale liberté – devient ici centrale. Il s’agit d’établir dans quelle mesure la perception du référent dépend de l’appareil cognitif ou linguistique. À la fin de ce parcours, il assume des positions plus proches du cognitivisme.
À partir des années 2000, Eco poursuit des réflexions qui relèvent de sa pratique d’écrivain. Ces études sont collectées d’une part dans Sulla letteratura (2002) de l’autre dans Dire quasi la stessa cosa (2003). Sans proposer une véritable théorie, il offre des réflexions autour de ses expériences et il tire pleinement profit de son activité de traducteur et d’auteur parmi les plus reconnus et traduits de tout les temps (son premier roman, Le nom de la rose, 1980, a été édité dans presque une cinquantaine de langues). Le métier d’écrivain et le suivi soigné des traductions de nombreux romans absorbe une grande partie de son temps et l’apport à la sémiotique fondamentale devient moins assidu.
Il serait vain de chercher à limiter Umberto Eco à un portrait univoque. Il est, en même temps, critique, traducteur, sémiologue renommé, mass médiologue, écrivain à succès, intellectuel et journaliste d’opinion. Homme d’une culture apparemment sans limites, et en augmentation constante, il compte sûrement parmi les intellectuels les plus connus et reconnus en Europe et dans le monde (en France, notamment, il est Membre de l’Académie Universelle des Cultures, il a obtenu le Prix Médicis et le Prix Méditerranée Etranger, ainsi que la Légion d’honneur en 2003, et enfin le prix Alphonse-Allais en 2015 pour l’ensemble de son œuvre).
Figure emblématique de l’humanisme du XX siècle, dont les multiples facettes sont toutes marquées par son sens de l’ironie et de la bonne distance, et avec sa sensibilité et son intérêt aussi bien envers les sciences humaines que pour la technologie informatique, il condense les qualités du savant du siècle à venir.
Bibliographie sémiotique essentielle
– 1956 Il problema estetico in San Tommaso, Turin : Edizioni di Filosofia ; 2ème éd. révisée : Il problema estetico in Tommaso d’Aquino, Milan : Bompiani, 1970 ; trad. fr. Le problème esthétique chez Thomas d’Aquin, Paris : PUF, 1993 (éd. révisée).
– 1959 « Sviluppo dell’estetica medievale », in Momenti e problemi di storia dell’estetica, Milan : Marzorati ; 2 ème éd. révisée : Arte e bellezza nell’estetica medievale, Milan : Bompiani, 1987 ; trad. fr. Art et beauté dans l’esthétique médiévale, Paris : Grasset, 1997.
– 1962 Opera aperta, Milan : Bompiani (2ème éd. révisée : 1967 à partir de l’édition française de 1965, 1971) ; trad. fr. L’Œuvre ouverte, Paris : Seuil, 1965 (éd. révisée).
– 1963 Diario minimo, Milan : Mondadori ; trad. fr. Pastiches et postiches, Paris : Messidor, 1988, (éd. avec des ajoutes) Paris : 10/18, 1996.
– 1964 Apocalittici e integrati, Milan : Bompiani, (éd. révisée en 1977).
– 1968 La struttura assente, Milan : Bompiani, (dernière édition, révisée 1983) ; trad. fr. La structure absente, Paris : Mercure, 1972 (éd. révisée).
– 1971 Il segno, Milan : Isedi. 2ème éd., Milan : Mondadori ; trad. fr. Le signe, Bruxelles : Labor, 1988 ; Paris : Livre de Poche, 1992.
– 1975 Trattato di semiotica generale, Milan : Bompiani ; trad. fr. partielle La production des signes, Paris : Livre de Poche, 1992.
– 1979 Lector in fabula, Milan : Bompiani ; trad. fr. Lector in fabula, Paris : Grasset, 1985.
– 1984 Semiotica e filosofia del linguaggio, Einaudi : Turin, 1984 ; trad. fr. Sémiotique et philosophie du langage, Paris : PUF, 1988.
– 1987 Notes sur la sémiotique de la réception, Paris : Actes Sémiotiques ix, 81.
– 1990 I limiti dell’interpretazione, Milan : Bompiani ; trad. fr. Les limites de l’interpretation, Paris : Grasset, 1992.
– 1992 Interpretation and overinterpretation, Cambridge : Cambridge U.P ; trad. fr. Interpretation et surinterpretation, Paris : PUF, 1995.
– 1993 La ricerca della lingua perfetta nella cultura europea, Bari : Laterza, 1993 ; trad. fr. La recherche de la langue parfaite dans la culture européenne, Paris : Seuil, 1994.
– 1994 Six Walks in the Fictional Woods, Cambridge : Harvard U.P., 1994 ; trad. fr. Six promenades dans les bois du roman et ailleurs, Paris : Grasset, 1996.
– 1997 Kant e l’ornitorinco, Milan : Bompiani, Kant et l’ornithorynque, Paris : Grasset, 1999.
– 2002 Sulla letteratura, Milan : Bompiani ; De la littérature, Paris : Grasset 2003.
– 2003 Dire quasi la stessa cosa, Milan : Bompiani ; Dire presque la même chose, expériences de traduction, Paris : Grasset 2007.
– 2012 Scritti sul pensiero Medievale, Milan : Bompiani ; Écrits sur la pensée au Moyen Âge, Paris : Grasset : 2015.
Umberto Eco savant, humaniste, homme
Par Jean-Marie Klinkenberg de l’Académie royale de Belgique
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Umberto Eco n’est pas qu’un magnifique écrivain, et ce « sémiologue » que la presse reconnaît en lui.
Sa formation est d’abord celle d’un philosophe. Elle est consacrée par une thèse sur Thomas d’Aquin, défendue à l’Université de Turin (1954). Commence alors pour Eco une double carrière de chercheur et d’homme de médias. Le jeune scientifique mènera surtout des recherches sur l’esthétique médiévale. Le journaliste, quant à lui, collaborera d’abord à la radio-télévision italienne, puis s’investira régulièrement dans la presse écrite.
Cette double expérience ne sera pas sans influencer les thématiques de recherche d’Umberto Eco, mais aussi l’allure générale de ses travaux.
Son expérience de terrain fera en effet de lui un spécialiste des médias et de la communication de masse. Celle-ci est alors en plein développement, ce qui produit des modes de sociabilité inédits, mais aussi des formes nouvelles, auxquelles le chercheur est sensible. C’est alors que l’esthéticien, soucieux de la généralité des concepts qu’il exploite, se fait connaitre par un texte fondateur, L’Œuvre ouverte (1962), salué par la critique, mais aussi pris comme référence par tous les créateurs de l’époque (par exemple le Gruppo 63, ou le musicien Henri Pousseur).
Les exigences du philosophe continuent à se manifester : ce qu’il convient de chercher, par-delà la variété de surface des pratiques esthétiques et médiatiques, c’est le sens. La méthode s’impose donc : elle sera sémiotique. Et c’est la deuxième contribution incontournable d’Eco à la pensée contemporaine : La Structure absente, introduction à la recherche sémiotique (1968).
Tout en restant protéiforme — on ne compte pas ses ouvrages portant sur des questions de théorie littéraire, de pragmatique ou d’histoire des idées —, la production scientifique d’Eco sera alors de plus en plus résolument sémiotique. Jalonnée par des ouvrages majeurs comme A Theory of Semiotics ou Sémiotique et philosophie du langage, elle offrira une synthèse extrêmement originale — à laquelle on a trop peu recours de nos jours — du structuralisme européen et de la tradition pragmatique anglo-saxonne. La première est critiquée dans La Structure absente, mais saluée pour la rigueur de ses les techniques de description, qui restent féconde. Dans la seconde, illustrée par Peirce, le signe n’est pas autonome, et Eco fait bien voir que ce dernier est toujours corrélé aux contraintes sociales et anthropologiques qui déterminent sa pratique.
Contraintes sociales et anthropologiques, mais aussi contraintes cognitives. C’est à elles que s’ouvre le maitre essai Kant et l’Ornithorynque (1997), dont on se désole qu’il n’ait pas été suivi d’un autre ouvrage, tant les thèses de ce dernier — sur l ’iconisme, ou sur la sémiogenèse — ont suscité des réactions constructives venant compléter ou corriger les positions d’Eco.
A côté de sa œuvre propre, le sémioticien a aussi joué un rôle capital de généreux et dynamique animateur de la discipline : il crée des revues — comme VS —, des collections scientifiques, il organise en 1974 le tout premier et inoubliable congrès mondial de sémiotique et s’implique dans l’AIS-IASS, il met sur pied des enseignements de sémiotique, à l’Université de Bologne et ailleurs…
Les parcours professionnels d’Eco ont déterminé le style de ses travaux, ai-je dit. L’ancien chroniqueur a en effet toujours excellé à mettre à la disposition de tous les savoirs les plus pointus. Ce rayonnement à trouvé à se manifester dans des ouvrages à visée pédagogique (on plaint les étudiants de tous pays de ne disposer de rien de semblable au petit manuel Come si fa una tesi di Laurea…1977), dans des synthèses magistrales, comme son classique Le signe (1988), dans de multiples articles — souvent mordants, toujours stimulants — réunis en volumes, dans de beaux essais illustrés, comme Histoire de la beauté (2002) ou Vertige de la liste (2009). Sa production littéraire, connue du grand public et spectaculairement inaugurée avec Le nom de la rose (1980), peut d’ailleurs apparaître comme une retombée des travaux scientifiques d’Eco ; par exemple, Le pendule de Foucault (1988) est manifestement une parabole illustrant les thèses de Les limites de l’interprétation, qu’il rédigeait parallèlement à son roman (1990).
Enfin d’autres essais, comme Croire en quoi ? (1996) Cinq questions de morale (1997) ou À reculons, comme une écrevisse (2006) montrent que cet héritier des encyclopédistes et des penseurs de la renaissance est aussi un moraliste et un citoyen courageux.
Les mérites d’Umberto Eco ont été universellement reconnus. Il a été professeur invité partout dans le monde, de Yale (où il a séjourné à trois reprises), Columbia, Cambridge et Oxford au Collège de France et à l’École Normale Supérieure de la rue d’Ulm. Il est Docteur Honoris causa de près de 40 universités dans une vingtaine de pays et fait partie de plusieurs academies (Académie royale de Belgique, Académie des sciences de Bologne, Academia Europea de Yuste, American Academy of Arts and Letters, ou encore Accademia Nazionale dei Lincei, la plus ancienne au monde…)
Le portrait ne serait pas complet si on ne rendait aussi hommage à la personnalité généreuse d’umberto Eco.
Deux anecdotes à cet égard.
Vers la fin des années 80, je me mets à traduire Segno, estimant qu’il n’y avait pas en langue française d’introduction à la sémiotique qui ne soit pas exagérément scolaire ou servilement inféodée à une doctrine. Mais divers problème m’empêchent d’avancer comme je le voudrais dans le petit travail. Quand je suis arrivé au moment d’y mettre la dernière touche, Umberto estime que le texte devrait être mis à jour ; mais il n’en a pas lui-même le temps. Du coup, il me demande d’y apporter les modifications nécessaires, en se bornant à me fournir quelques indications. Voilà l’explication de la mention figurant sur les éditions de ce libre (qui n’est pas n’est « traduit de l’italien » mais « adapté de l’italien») ; mais pour moi, c’est avant tout le souvenir d’une collaboration féconde, souriante et complice.
Deuxième anecdote. J’accueille Umberto à l’université de Liège, qui le fait Docteur Honoris causa. Il me demande de décourager les médias, trop envahissants. Mais une jeune étudiante en journalisme réussit malgré tout à percer le barrage. Il répond à ses questions, très souriant. A la fin de l’entretien, nous voyons l’étudiante blêmir : dans sa fébrilité, elle a oublié de mettre une cassette dans son enregistreur ! Touché par son désarroi, Umberto lui donne rendez-vous un peu plus tard, pour reprendre l’entretien au calme.
Tel est Umberto Eco : toujours humain et oublieux de lui-même, ayant toujours su stimuler les autres et leur faire confiance.
Par Valentina Pisanty, Sémiologue, Università di Bergamo
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In questi giorni si parlerà moltissimo dell’opera di Umberto Eco, dei sette romanzi e degli innumerevoli saggi, delle Bustine di Minerva, della Semiotica, degli studi sul Medioevo, delle analisi critiche su media e società, del gusto per l’enigmistica e per i giochi di parole, dell’umorismo, dell’erudizione, delle istruzioni su come scrivere una tesi di laurea e su come viaggiare con un salmone, e in generale della sua travolgente energia intellettuale. Io invece vorrei parlare di Eco come professore. Non solo perché è stato il mio professore – così l’ho conosciuto e così ho continuato a considerarlo anche quando siamo diventati amici – ma soprattutto perché quel ruolo lo definisce meglio di qualsiasi altro.
Professore in Italia è una parola screditata : arroganti, privilegiati, pedanti, fannulloni, astrusi, fumosi e vanesi… Eco era esattamente l’opposto. Professore per vocazione, non saltava una lezione, non arrivava in ritardo, non delegava i compiti meno gratificanti ai collaboratori più giovani, non fingeva di leggere le tesi : le annotava e le riempiva di orecchie per trovare rapidamente il segno, e poi ne discuteva come si discute tra colleghi, senza intimidire gli studenti con il suo schiacciante vantaggio culturale, se non attraverso battute che sondavano amabilmente il temperamento degli interlocutori. Le gerarchie non lo interessavano perché ostacolavano il libero scambio di idee, e che altro si deve fare all’università se non confrontare interpretazioni intelligenti e informate per vedere quale la spunta sulle altre ? Preparava i corsi con l’entusiasmo e il puntiglio di un principiante, ma poi in aula gli appunti prendevano vita, e chi lo ascoltava rimaneva rapito : non solo dalla sua sapienza, che da sola avrebbe potuto ottundere il senso critico degli ascoltatori inesperti, ma dal rigore dei suoi ragionamenti, corredati di aneddoti curiosi e di esempi esposti con la massima chiarezza, così da incoraggiare contro-esempi e tentativi di confutazione. In ciò sta l’essenza del metodo scientifico, di cui Eco era un campione.
Ma Eco era professore anche quando faceva altre cose. È stato detto che i suoi romanzi sono didascalici, saggi confezionati in forma narrativa. In parte è vero, come è vero il contrario : i suoi saggi hanno una struttura marcatamente narrativa. Del resto si sa che le due attività procedevano in parallelo : Il nome della rosa riprendeva gli studi su Peirce e l’abduzione, Il Pendolo di Foucault quelli sui limiti dell’interpretazione, L’isola del giorno prima andava di pari passo con la ricerca sulle lingue perfette, e così via, in un continuo andirivieni tra narrazione e teoria che costituisce il proprio del lavoro di Eco (del quale di qui in poi parlerò al presente : l’autore non c’è più, ma i libri per fortuna rimangono). L’unità della sua opera è il prodotto di una mente protesa a raggiungere altre menti, di una tensione permanente, di una continua sfida alla pigrizia. Per Eco nessuno sforzo creativo vale la pena di essere esibito in pubblico se non contribuisce a rendere più intelligenti i destinatari, che si tratti di un gioco, di un racconto o di un trattato di semiotica generale. Combattere la stupidità in tutte le sue forme – così come elencate in un celebre passo del Pendolo di Foucault – è il suo obiettivo, e non a caso ha dedicato moltissime pagine alle aberrazioni logiche di cui è capace la mente umana. Obiettivo da professore ? Sì, perché conoscere e capire non è noioso, è divertente, come diceva il suo amato Aristotele ; è il non capire e il non conoscere semmai a essere noioso.
E poi Eco è tutto il contrario dello snob. Non c’è oggetto (così come non c’era studente, per quanto timido e impacciato) che per lui non sia degno della massima attenzione. Sotto il suo sguardo analitico finiscono i più diversi fenomeni della cultura di massa, indagati con lo stesso acume che applica all’estetica medioevale o alle poetiche di Joyce. Dalla paraletteratura alla pubblicità, dal design industriale al giornalismo, dal tifo calcistico ai fumetti, dal nonsense agli slogan politici, in tanti anni di militanza semiotica Eco ha educato l’Italia (e non solo l’Italia) a ragionare su tutti gli aspetti della sua cultura, nella convinzione che anche in un libretto di istruzioni, in una fotografia o in una frase fatta si annidino perversioni di senso da portare alla luce. Logiche sbilenche di cui farsi beffa sempre in nome della lotta contro la stupidità, specie quando questa venga messa al servizio dei prepotenti.
Anche il suo umorismo – irresistibile, contagioso : Eco occupa di diritto un capitolo nella storia dell’umorismo – è da professore. Non il professore sarcastico che si accanisce contro un interlocutore impotente, ma quello arguto che lo rende complice di un gioco imprevedibile. Non per niente alcuni dei suoi articoli più divertenti (per esempio le “40 regole per parlare bene l’italiano”) sono virali sui profili Facebook degli odierni sedicenni, esilarati da sentenze come “Evita le frasi fatte : è minestra riscaldata”, “Non usare metafore incongruenti anche se ti paiono ‘cantare’ : sono come un cigno che deraglia” e, not least, “Solo gli stronzi usano parole volgari”. La sfida è insegnare divertendo, creare complicità, indurre chi ascolta a capovolgere i luoghi comuni e a stanarne la presenza in ogni affermazione roboante, manipolazione subdola e dogmatismo idiota.
La stupidità per Eco è la morte. “L’unico modo di prepararsi alla morte è convincersi che tutti gli altri siano dei coglioni”, scrive in un memorabile articolo del 1997. È penosissimo accettare l’inevitabilità della propria dipartita se si pensa che la vita sia piena di delizie e che il mondo sia popolato da persone di valore. Ma se si prende atto della meschinità, dell’insulsaggine e della stoltezza di chi ci sta intorno, allora si può morire senza eccessivi rimpianti. L’importante è non giungere a questa conclusione troppo presto (altrimenti non vale più la pena vivere), ma arrivarci per gradi, attraverso una serie di disillusioni progressive. “Solo allora, alla fine, avrai la travolgente rivelazione che tutti sono coglioni. A quel punto sarai pronto per l’incontro con la morte”. Il 19 febbraio Umberto Eco ha concluso la sua personale lotta contro la stupidità universale. Oggi tocca a noi continuare a vivere.
Hommage à Umberto Eco
Dessin de EmMa sur le fond d’une aquarelle de Mariela Crivat-Ionesco
Emmanuel Crivat-Ionesco Président M. et Em. ART Association
Eco a México a inicios de los 80’s
Raúl Dorra, María Isabel Filinich, Luisa Ruiz Moreno, María Luisa Solís Zepeda, Blanca Alberta Rodríguez Vázquez miembros del Programa de Semiótica y Estudios de la Significación de Puebla
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Como todos ustedes, los miembros de nuestro equipo, Programa de Semiótica y Estudios de la Significación (SeS/BUAP), estamos consternados por la noticia del fallecimiento de Umberto Eco. Su pérdida impacta notablemente el ámbito académico y humano de los semiotistas de todo el mundo, particularmente la presencia de la obra y el pensamiento de Eco ha sido fundamental en América Latina. Muchos de los estudiantes de la comunicación, las ciencias del lenguaje y de las ciencias sociales y humanas han emprendido con entusiasmo su formación leyendo sus libros, tanto científicos como de ensayo en general y apreciando su pluma literaria.
Recordamos vivamente la visita de Eco a México a inicios de los 80’s, una multitud desbordaba un gran anfiteatro de la Facultad de Filosofía y Letras de la UNAM esperando la conferencia magistral que impartió ahí, a cuyo término la editorial Fondo de Cultura Económica organizó una recepción con un grupo selecto, pero igualmente numeroso, en una de sus grandes terrazas bajo la luz estridente de México. Fue la única vez que miembros de nuestro grupo tuvieron un contacto personal e imborrable con el maestro.
Llegue hasta ustedes, colegas de la Federación, y, sobre todo los semiotistas italianos que han tenido el privilegio de ser alumnos y estrechos amigos de Umberto Eco esa luz de la región más transparente.
Du sémiologue au romancier : le gai savoir d’Umberto Eco
Par François Jost, Professeur à Paris 3 Sorbonne
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Un sémiologue comme moi doit d’abord à Umberto Eco la légitimité d’un nom. Avant que ces travaux atteignent un public au-delà du petit monde académique, je faisais une profession qu’il était difficile de nommer. Dès que l’on prononçait le mot de « sémiologie », c’était aussitôt une pluie de questions et il fallait, pour faire comprendre de quoi il s’agissait, se lancer dans un cours face à un destinataire qui n’en attendait pas tant.
Paradoxalement, c’est au moment où il a quitté les rivages arides de cette discipline pour se lancer dans la littérature, qu’elle a atteint une certaine reconnaissance grâce à lui. On s’est soudain émerveillé devant ce professeur très sérieux, écrivant dans une langue difficile à comprendre par le profane, qui se mettait à écrire des romans. Jusqu’alors, il paraissait aller de soi que la théorie et la pratique étaient deux mondes totalement séparés, et qu’on de pouvait attendre d’un professeur qu’un ouvrage ennuyeux et scolaire, si ce n’est scolastique.
Bien sûr, c’était mal connaître Umberto Eco, qui était un être gai, pétillant d’humour, toujours prêt à raconter une histoire drôle. Dans les années 1980, la petite ville italienne d’Urbino a été le centre de la sémiotique mondiale. Chaque été, les chercheurs de plusieurs pays se retrouvaient pour discuter notamment de la théorie du cinéma. Un jour, Umberto Eco, qui avait une maison non loin de là, avait invité tout le colloque chez lui. Je garde encore en tête le concert qu’il nous a donné avec un ami, lui à la flûte, son ami à l’accordéon.
Le succès d’Eco trouve ces racines dans cette capacité qu’il avait à marier la pensée et l’amusement. A ceux qui voudraient en faire l’expérience et apprendre les concepts fondamentaux de la narratologie, je recommande Six promenades dans les bois du roman et d’ailleurs (1996), qui sont un parfait exemple de ce don pour la pédagogie, qui refuse d’identifier le sérieux à l’ennui et l’amusement au futile.
Il m’arrive qu’un lecteur du Plus se moque de mon identité, trouvant l’étiquette « sémiologie » prétentieuse. C’est mal comprendre cette discipline. La sémiologie telle que l’a pratiquée Eco, loin d’être tournée sur elle-même, est d’abord la manifestation d’une curiosité envers l’autre et le monde. Au lieu d’en rester à la valeur d’usage des objets du quotidien, de l’architecture ou des images, elle tente de comprendre comment ils font signes. Ce que je tente modestement de faire moi-même dans mes articles.
Il est impossible de résumer en quelques lignes l’œuvre considérable d’Eco. Mais je voudrais juste retracer le chemin ouvert par trois de ses livres, qui me semble très significatif, à la fois de la façon dont il a allié pratique romanesque et écriture théorique, et de l’esprit de liberté qu’il a enseigné. La première étape importante est constituée par L’œuvre ouverte (1965), dans laquelle il montre comment certaines œuvres modernes (notamment celle de Joyce) sont propices à de multiples interprétations et comment le texte ne ferme pas le sens. Nous sommes dans une époque structuraliste, où l’on pense que la constitution du sens vient d’abord du texte. En 1979, dans Lector in fabula, Eco déplace cette position : il explique que le texte est d’abord une « machine paresseuse » et qu’il ne serait rien sans l’activité du lecteur, qui ne comprend que grâce à de nombreux savoirs qu’il apporte avec lui : savoirs sur le monde comme savoirs sur le récit lui-même. De là à prétendre que le lecteur peut tout dire à propos d’une œuvre, il n’y a qu’un pas, qui est très souvent franchi. Pour mettre fin à cette dérive indéfinie du sens, il publie Les limites de l’interprétation, qui revendique l’accord sur un sens minimal, littéral d’une œuvre. Entretemps, Eco a fait l’expérience de romancier, en publiant Le Nom de la rose, et il a pu constater les excès d’un lecteur tout puissant qui confond ses rêveries avec ce que dit le texte. C’est sans doute sa capacité interaction entre différents rôles – le romancier, le professeur, le sémiologue – qui a permis à Eco de produire une œuvre si foisonnante : Le Roman de la rose n’aurait pas existé sans sa thèse sur Saint-Thomas d’Aquin, ses écrits théorique sur le lecteur sans l’expérience de la fiction. Aussi Eco a réussi à réconcilier deux instances que l’on oppose souvent : le penseur et l’artiste.
Umberto Eco ou la traversée des savoirs
Par Denis Bertrand, Président de l’Association Française de Sémiotique
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Au nom de l’Association Française de sémiotique et aussi, bien sûr, en mon nom propre, je voudrais partager avec tous nos amis italiens la peine de la séparation au moment où nous venions, avec Jacques Fontanille, d’inviter Umberto Eco à venir ouvrir par une conférence inaugurale l’hommage que nous allons rendre à Algirdas Julien Greimas en 2017 au palais de l’Unesco à Paris, pour le centenaire de sa naissance. Je voudrais évoquer en quelques mots notre lien transalpin, si profondément ancré, et la reconnaissance réciproque de sémiotiques pourtant distinctes.
Au terme du recueil d’hommages qui lui étaient rendus à Cerisy-la-Salle en 1996, Umberto Eco écrivait : « Je crois que l’un des désirs les plus répandus chez les êtres humains est celui d’assister à ses propres funérailles ». Et il ajoutait quelques lignes plus loin que « celui qui assiste à ses propres funérailles a bien évidemment le malheur, ensuite, d’être muet à jamais. »[1] Cette histoire aujourd’hui nous fait gravement signe, à travers son sourire. En elle se condense, non pas tous les aspects de l’œuvre d’Umberto Eco car ils nous feraient entrer dans le vertige de la liste, mais un grand nombre d’entre eux et aussi le tempérament qui habite cette œuvre.
Le bon mot tout d’abord, qui est la marque du partage humain face à l’abîme et aux limites du sens, par delà la mort ; la volonté de savoir, ensuite, cette hantise de découvrir les significations cachées sous l’imperfection des signes, alors vus de dos, saisis clandestinement, à la dérobée ; la conception du langage, enfin, entre la vérité et le chausse-trappe, entre ses révélations, ses illusions et ses faux semblants. Il le dit lui-même, lorsqu’il se met en quête du lien qui traverse une œuvre aussi formidablement diverse, ce lien qui en assure la cohérence et la fixe sur un socle unique : « Mon interrogation sur la sémiotique (est) de savoir comment nos signes rendent raison de ce qui est ou comment ils nous construisent ce qui n’est pas. »[2] Quant au deuxième volet de ce bref récit fantastique, « le malheur d’être muet à jamais », il est aussi irréel que le premier, mais dans un autre sens. Car la parole d’Umberto se poursuit, se prolonge, se fait et se fera comprendre, toujours vive dans le monde de la lecture, cette « immortalité à rebours » comme il disait. Il entre ainsi, sur un autre mode, dans la grande compagnie de ces cinq mille vies que peut expérimenter un bon lecteur, un modèle de lecteur comme il le fut. D’ailleurs, quand on le lit, on l’entend.
Tous les commentaires s’émerveillent de la multiplication des rôles thématiques d’écriture dans un seul homme : l’historien, le philosophe, le sémioticien, le romancier, le chroniqueur, l’éditorialiste. Pour nous, c’est sans doute le sémioticien qui prime. Mais avec une particularité qui le rend unique : l’alliance entre la pensée spéculative la plus exigeante et la pensée figurative la plus proche du monde, celle qui fait fourmiller les anecdotes, les dernières blagues et les créations sensibles. Cette alliance ne se trouve pas seulement dans la distribution des différents genres d’écriture auxquels il s’est livré, l’essai théorique ou le roman par exemple. Elle ne se dispose pas comme sur un écheveau rhétorique, entre argument et exemple. Non. Cette alliance se trouve au sein de chacun de ces genres, de chacun de ces textes, intimement nouée à tout instant, faisant écouter la musique particulière de son énonciation. Il y a de la faconde dans le concept, et l’abstraction théorique s’immisce dans le récit le plus truculent. Les deux régimes du sens sont chez lui indissociables.
C’est par ce fabuleux entrelacs qu’il nous fascine. La traversée de tous les discours de l’époque, savants et populaires, épistémologiques aussi bien que médiatiques, qu’ils soient apparemment abscons ou faussement lumineux, nous fait penser au Rabelais du Tiers-Livre. Ce qui fait d’Umberto Eco un homme de la Renaissance. Et pourtant, dans notre domaine, nous avons pu mesurer au fil des années ce qui séparait la sémiotique interprétative d’origine peircienne qu’il défendait de la sémiotique structurale et discursive, d’origine hjelmslévienne, incarnée par les travaux de Greimas et ouverte aujourd’hui, par ses successeurs, à de nouvelles directions de recherche. Les spécialistes perçoivent les enjeux de débats qui restent ouverts, qu’il s’agisse des problématiques de la référence et du code, du signe et de l’inférence, de l’être, de la cognition et de la perception : c’est à coup sûr en Italie que les débats ont été les plus vifs. Mais à aucun moment il n’y a eu rupture. Avec lui, la polémique était avant tout contractuelle. Et cela est dû, pour l’essentiel, à une passion cardinale dans son œuvre et dans sa vie, qui est aussi une vertu : la générosité.
[1] U. Eco, « Quelques observations en guise de conclusion », in J. Petitot, P. Fabbri, éds., Au nom du sens. Autour de l’œuvre d’Umberto Eco, Colloque de Cerisy, Paris, Grasset, 2000, p. 581. [2] Ibid., p. 582.Par Denis Bertrand, Président de l’Association Française de Sémiotique
Per Umberto
Par Tarcisio Lancioni, Centro di Semiotica e teoria dell’immagine Omar Calabrese, Università di Siena
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Momenti come questo ci obbligano a riconnettere e a dare un senso comune a frammenti di esperienza, ricordi, prospettive, pensieri e giudizi accumulati in luoghi diversi della memoria e normalmente destinati a esistenze distinte e disconnesse. Sforzo che si accompagna a quello di provare a non essere né banali né patetici, nel tentativo di scrivere qualcosa che, almeno remotamente, possa essere in grado di onorare una figura “colossale” come quella di Umberto Eco.
Romanziere di grande successo, tale da meritare le copertine dei più importanti rotocalchi internazionali, pensatore acuto, fra i padri della “svolta semiotica” per citare un titolo di Paolo Fabbri, tanto che, almeno in Italia, ci si riferisce alla sua prospettiva “interpretativa” come a una delle due vie della semiotica (in alternativa, un po’ semplicistica, a quella “generativa” di Greimas). Tributario di lauree honoris causa e di onorificenze accademiche e civili che questo spazio non basterebbe ad elencare. Capace di influenzare espressività e stili di pensiero disparati : aneddoticamente, poco tempo fa, uno dei migliori storici dell’arte americani, Joseph Koerner, mi ha scritto, a margine di altri argomenti, che il suo lavoro è sicuramente rimasto influenzato dalle lezioni di Eco, che aveva avuto occasione di seguire a Yale anni addietro (ma perché gli storici dell’arte americani sono influenzati dalla semiotica e quelli italiani no ?), e giusto pochi giorni fa ho appreso che Keith Haring avrebbe dichiarato di essere stato folgorato dalla semiotica di Eco (grazie Elisa).
Protagonista di primo piano della stagione eroica della neoavanguardia, a fianco di Berio, di Balestrini, di Anceschi ; intellettuale arguto e rigoroso, sempre pronto a mordere o a pungere, con sarcasmo o con ironia, per mettere a nudo le miserie quotidiane della nostra società e della nostra quotidianità riflesse nel caleidoscopio mediatico, di cui è stato uno dei primi studiosi rigorosi. Contro l’accademia benpensante, a fianco di Roland Barthes e poi di Omar Calabrese, per citare altre due figure che gli sono state molto vicine, Eco ha infatti mostrato la necessità di studiare a fondo, con strumenti adeguati, i fenomeni della cultura di massa, se non altro per imparare a difendersene, come quando, nei primi anni Settanta, lanciava lo slogan programmatico della guerriglia semiologica : occupate un posto in prima fila ovunque ci sia un televisore acceso e svelatene i meccanismi ingannevoli !
Dietro a questo monumento pubblico, i ricordi personali, l’Eco “umano”, il professore e lo scherzoso burlone, non raramente scandalosamente sboccato, pronto alla battuta salace come all’osservazione acuta o alla glossa dotta, tutto insieme, tra una citazione di Tommaso d’Aquino e un’”Osteria”, preferibilmente accompagnato alla fisarmonica dall’amico Gianni Coscia, come nella notte memorabile della festa di matrimonio di Omar Calabrese.
A Umberto Eco devo molto, perché mi ha insegnato molto. Non solo la semiotica ma anche l’etica della ricerca, scoperte insieme nelle aule affollatissime e fatiscenti di Via Guerrazzi, nella Bologna travagliata e felice dei primi anni Ottanta. Spazi in cui, vicino a Eco, insegnavano e studiavano altre figure che avrebbero caratterizzato i destini della semiotica italiana : Paolo Fabbri, Omar Calabrese, Ugo Volli, Patrizia Violi, Giovanni Manetti, Francesco Marsciani, Isabella Pezzini, Daniele Barbieri, Patrizia Magli, Maria Pia Pozzato, Alessandro Zinna, Lucia Corrain, Costantino Marmo, Sandra Cavicchioli, Gianpaolo Proni… per ricordare solo quelli che mi sono rimasti più cari e che più hanno condizionato la mia formazione.
Una formazione che mi ha portato a “tradire” la semiotica di Eco, aderendo alla proposta teorica di Greimas. “Tradimento” maturato in realtà, come per tanti altri suoi allievi e collaboratori, proprio grazie allo stesso Eco. Perché Eco non è mai stato un dogmatico e credo che sia anzi importante ricordare che la scuola greimasiana ha trovato spazio in Italia proprio a Bologna, anche grazie a Umberto, che di Greimas ha fatto tradurre i libri nella sua collana editoriale, e di cui discuteva le idee a lezione, dando spazio ai suoi dottorandi che avevano preso la strada di Parigi per trovare idee e prospettive nuove, senza rinnegare Eco, e senza essere da lui rinnegati. Anzi, il grande sforzo semiotico di Eco, la sua via alla semiotica è stata proprio quella della mediazione, della conciliazione, fra i modelli strutturalisti, di cui aveva iniziato a criticare le debolezze in La struttura assente, e il pragmaticismo di Peirce, di cui è stato indubbiamente uno degli interpreti più brillanti.
Il mio rapporto personale con Eco si è stretto in particolare durante il lavoro di tesi, grazie soprattutto a Calabrese, mio relatore, che per Eco ha sempre avuto, ricambiati, una immensa stima e un immenso affetto. Eco mi aveva chiesto se fossi interessato a una ricerca sulla teoria del segno in Alain de Lille, mettendomi in fuga, e avevo invece trovato più interessante svilupparne un’altra incentrata sulla cartografia congetturale. In particolare avevo deciso di dedicarmi agli isolari, atlanti cartografici redatti in gran parte fra XV e XVII secolo in cui veniva sistematizzato il sapere sulle isole, incorporando le conoscenze geografiche ma anche quelle “leggendarie”, mettendo fianco a fianco terre conosciute, terre immaginate e terre ipotizzate.
Questi “testi”, scoprii presto, erano particolarmente apprezzati da Eco, che non solo ne aveva ampia conoscenza, ma di cui possedeva anche alcuni esemplari preziosi : il Bordone, di cui ha poi curato un’edizione critica, il Porcacchi, il Buondelmonti. Esemplari che mi mise a disposizione aprendomi il sancta sanctorum, i recessi più preziosi della sua biblioteca domestica, e offrendomi la possibilità di studiarli e discuterli, fino a propormi di trasformare la tesi in un libro, da pubblicare in tiratura limitata, con una sua presentazione, presso un “misterioso” circolo di bibliofili, di cui Eco era il presidente : l’Aldus Club, che si riuniva periodicamente in una libreria antiquaria in via Rovello, nel cuore della vecchia Milano. Mi trovai così proiettato in un ambiente, di cui avrei ritrovato le atmosfere nei suoi romanzi, in cui si discuteva della vita di libri rari, agognati come tesori, ma anche, soprattutto grazie a Eco, dei loro contenuti “esoterici” : saperi spesso arcani, strambi, fantasiosi, condannati irrimediabilmente ad essere perduti con il mondo che li aveva prodotti, a marcire con i libri che li contenevano, destinati com’erano a non essere mai più ripubblicati. In realtà Eco era praticamente l’unico dell’intero circolo ad essere attratto dai contenuti dei libri che venivano citati e non solo dal loro valore materiale. Contenuti destinati ad alimentare la sua fantasia narrativa e a riemergere nei suoi romanzi, soprattutto ne il Pendolo di Foucault e in L’isola del giorno prima.
Esperienza che mi ha dato la possibilità di apprezzare fino in fondo la portata della sua curiosità intellettuale, la capacità di conciliare un impianto di pensiero fortemente razionale e il piacere per ciò che razionale non è e con cui si può giocare, anche per rivelarne le debolezze o l’inconsistenza. Insieme a ciò ho avuto il privilegio di sperimentare la sua pazienza la sua generosità espresse nella preparazione del libro, dai consigli per la redazione fino alla sua revisione materiale. Pazienza che ha continuato a mostrare, anche se con qualche brusco rimbrotto, durante la preparazione della tesi di dottorato, di cui era direttore. Tra una laurea honoris causa, un libro di successo, un invito prestigioso, Eco non perdeva di vista il lavoro di chi gli stava vicino, ne ha sempre conosciuto e seguito le ricerche, dando sostegno effettivo, e ho sempre trovato che questo fosse uno dei tratti della sua eccezionalità.
Devo molto a Umberto Eco.
Par Gianfranco Marrone, Circolo semiologico Siciliano, Université de Palerme
E poi molti hanno detto : Umberto Eco è un classico. Così tutti a rileggerlo trovandovi cose nuove : come ad avverare, ex post, l’affermazione forse più frequente nei ricordi coccodrillosi apparsi i giorni immediatamente successivi la sua dipartita. E per il desiderio di essere come tutti, direbbe un recente strega, l’ho fatto anch’io che lo faccio da sempre. Ho prenotato dal mio edicolante di fiducia Come viaggiare con un salmone (abbinato a “Repubblica”, € 10) sapendo perfettamente che avrei acquistato una parte del Secondo diario minimo (letto e recensito all’epoca). E sono corso in libreria a procurarmi una copia del Pape Satàn Aleppe. Cronache di una società liquida (La nave di Teseo, pp. 469, € 20) prima che ne esaurissero le scorte, sapendo altrettanto bene che si sarebbe trattato d’una raccolta di bustine che ho compulsato con regolarità quindicinale nell’ultima dozzina d’anni. (La bustina, si sa, è ormai un genere letterario : rubrica inventata da Eco a metà degli anni Ottanta per chiudere “l’Espresso” e da allora, come la “Settimana enigmistica” nel suo campo, fra i tipi testuali e trovate editoriali più imitati al mondo. Non c’è magazine o rivista che non la adotti ; non c’è autore, scrittore o aspirante tale che non la pratichi).
Li ho divorati entrambi in un week end, il primo senza di lui, e l’effetto è stato, com’è d’uopo coi classici, straniante. Non tanto perché non mi ci ritrovassi : sono tutte cose che grosso modo ricordavo, nei temi e nello stile. Il Salmone è una divertentissima serie di false istruzioni per l’uso (come fare l’indiano, come fare vacanze intelligenti, come mangiare il gelato, come presentare in tv…) che prende ferocemente in giro gli usi e i costumi di cui parla (siamo nella seconda metà degli Ottanta). Spesso mediante antifrasi (“come parlare agli animali”, per dire, mostra come non fa fatto), talvolta con aggiunta di mise en abyme (c’è un “come seguire le istruzioni” che spiega come non vanno scritte). L’esperimento ricorda certi geniali testi di Cortázar (istruzioni per salire le scale, per camminare…) o di Watzlawick (istruzioni per rendersi infelici), ma con un humour a tutto campo e ben più intenso : un ottimo modo per fare critica sociale (o mitologia alla Barthes) col sorriso sulle labbra. Il Pape Satàn (titolo dantesco che, significativamente, non significa nulla) ripropone alcune centinaia di bustine degli ultimi quindici anni raggruppate per grandi temi (le differenze generazionali, la tecnologia e i telefonini, la rete, il razzismo, il ruolo attuale della filosofia, la sindrome del complotto…). Il principio che tiene insieme il tutto, come recita il sottotitolo, è la fortunata formula di Bauman circa la fluidità che caratterizzerebbe la nostra attuale configurazione socio-culturale. Crisi dello Stato e della comunità, delle ideologie e dei partiti, individualismo confuso, consumismo sfrenato, mancanza di valori : è noto. Ed Eco tratta tali fenomeni da par suo, con fiuto per il dettaglio, grande capacità di astrarre a partire dalla minuzia banale o dall’accadimento quotidiano. La società liquida, per lui, non è una formula interpretativa generica ma un universo semiotico da articolare e comprendere per poi – e ci tiene a ribadirlo – poterlo combattere, o addirittura superare. Rileggere queste cinquecento pagine dove osservazioni minime, notazioni casuali o intuizioni immediate annotate sul retro di un pacchetto di fiammiferi finiscono per diventare classici del pensiero è pratica non comune – e, va detto, fortemente inattuale. Dunque un esercizio salutare, e ben ha fatto la Nave di Teseo ad anticipare i tempi e presentarcele subito, quando l’emozione per la perdita del suo autore è ancora vivissima.
Quel che mi ha colpito, a leggere simultaneamente questi due libri incrociando l’uno con l’altro, è la radicale differenza di tono, non di idee o di stile ma, come dire, di inflessione affettiva. A parte alcuni scritti recenti presenti in entrambi i volumi (per ragioni, supponiamo, di irrequietezza editoriale), si tratta di due mondi molto diversi, quasi opposti. Nel Salmone c’è un Eco che, raggiunto il successo, fa di tutto per liberarsi dalle centomila scocciature che ne derivano. Con un po’ di gigioneria, certo, ma con tanta, tanta ironia. Nell’elencare le sue istruzioni fittizie, Eco si mette in gioco personalmente, dice di sé in volo business class, dove non sono in grado di servire un pranzo decente senza compromettere i tessuti dell’abito, o racconta del salmone freschissimo che va a male per colpa del frigobar di un hotel a cinque stelle collegato automaticamente al computer centrale. Storie buffe vissute personalmente, nella lotta quotidiana contro i postulanti d’ogni specie che lo invitano dovunque e per ogni cosa. E alla signora importuna che lo apostrofa impertinente – “suvvia, se vuole, uno come lei il tempo lo trova” – sciorina la serie dei suoi impegni settimanali facendo un contro astronomico delle ore destinate al lavoro. Con Pape Satàn troviamo un Eco molto, molto diverso, che se pure non perde il suo piglio ironico, lo ridimensiona fortemente. L’autore guarda molto meno a se stesso e molto di più al mondo. O meglio, usa molto meno la propria prospettiva personale per mettere a fuoco le grandi questioni che attraversano la società contemporanea. Parlando di strategie mediatiche ed eterni razzismi, oscure cospirazioni e profezie astrologiche, frenesie religiose e guerre, guerre, guerre, Eco ha di gran lunga rimosso il problema delle schiere di postulanti (pur tuttavia presentissime) che lo assillano con richieste tanto insulse quanto numerose. Si ritira in buon ordine, come lasciando scorrere ai suoi destini la società liquida, la quale, fra l’altro, sembra usare il passo del gambero. Internet, per dire, è zeppa di siti che inneggiano al peggiore passato.
Che si tratti di un comune problema d’età ? del segno che, come si dice, avanzando con gli anni arriva saggezza e mestizia ? Mi rifiuto di addivenire a una soluzione così banale. La spiegazione potrebbe essere un’altra. Quel che è cambiato non è tanto l’osservatore, i suoi modelli interpretativi, i suoi umori, le pieghe della sua esistenza privata. A essere profondamente mutata è la natura della stupidità umana contro cui perigliosamente combattere. Se, come sappiamo, il principale e perpetuo nemico di Eco, della sua variegata riflessione semiotica e filosofica, della sua multiforme scrittura romanzesca e giornalistica è, appunto, la stupidità, occorre individuarne non solo la gravità delle conseguenze ma la molteplicità delle forme con cui, presentandosi a noi, tende a camuffarsi d’altro. Eco sa bene, lo ha sempre saputo, che l’idiota è dappertutto in mezzo a noi e, funestamente, vince sempre (si rilegga la tipologia degli stupidi nelle prime pagine del Pendolo di Foucault, e, ancor prima, l’analisi di “Lascia o raddoppia” nel primo Diario minino). E sa anche che a ogni maschera della stupidità occorre rispondere in modo differente, con mezzi specifici, tattiche appositamente ridisegnate. Insomma, a paragonare le pagine di Eco delle due epoche, viene fuori molto chiaramente come lo scemo degli anni Ottanta sia molto diverso da quello attuale. La stupidità d’allora era ingenua, bonacciona, superficiale, goffa. La rappresenta bene quella signora che, accolta nello studio del maestro e ammirando la vastità della sua biblioteca, credendo d’essere originale sbotta con : “ma li ha letti tutti ?”. La stupidità, dal Duemila in avanti, è d’altro genere. Diventa melliflua, ipocrita, calcolatrice, furba, tendenzialmente cattiva. Tende perciò a nascondersi dietro mille ragionamenti (scorretti), ad avanzare centinata di ipotesi (strampalate), ad additare complotti e fomentare sospetti, ad affannarsi a dimostrare con argomentazioni sedicenti ragionevoli la necessità della violenza e della guerra. In questo caso, il rappresentate ideale è George W. Bush, le cui frasi celebri sono raccolte da Eco in un intervento del 2002. L’allora Presidente degli Stati Uniti riusciva a proferire cose come “Se non ce la facciamo, rischiamo di fallire”, “La donna che sapeva che ho sofferto di dislessia – bene, io non l’ho mai intervistata”, “Francamente, gli insegnanti sono la sola professione che insegna ai nostri bambini”, So che gli esseri umani e i pesci potranno coesistere in pace”. Peccato che poi andava bombardare mezzo mondo, bambini compresi.